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Témoignage

Cette séance photo a rempli sa mission première : me faire accepter mon corps

Tout d’abord, une présentation s’impose. J’ai 46 ans, je suis papa d’un garçon de 14 ans et fraîchement divorcé au moment de ma participation au projet. Je vis en Seine et Marne et je bosse dans la grande distribution, comme cadre administratif. Physiquement, je pense ressembler à monsieur tout le monde. Enfin, c’est ce que je pense, car la réalité est totalement différente. Je n’aime pas mon corps. Je suis grand, rond avec des formes surtout à l’abdomen. En fait, je n’aime pas mon corps des épaules aux cuisses. En dehors de cette partie, ça va !!! Sexuellement parlant, je me suis longtemps considéré comme hétéro. En fait j’ai voulu être hétéro pour rentrer dans un moule et faire comme tout le monde. Et puis au fil de mon mariage, je me suis rendu compte que mon univers était plutôt tourné vers l’homme et le masculin. Je me suis menti à moi-même en pensant que j’allais mieux m’apprécier entouré d’hommes. Comme si être en compagnie d’hommes pouvait me rassurer sur mon propre corps. Car le problème venait de mon corps.  Ma vie perso d’alors était rythmée par des faux semblants hétéro et une réalité homo. J’aurai aimé être gaulé comme tous ces dieux du stade et en même temps, je tentai de me rassurer sur mon propre corps en fréquentant des hommes. Je suis assez pudique devant les femmes, et paradoxalement je peux être totalement libéré en présence d’un ou plusieurs hommes, quand il y un objectif sexuel au bout. Tout ça c’était avant mon divorce (que je n’ai pas provoqué, mais qui s’est imposé à moi).

 

Depuis 3 ou 4 ans, au regard de ce que je viens de dire, je me suis mis à chercher un photographe qui accepterait de me prendre en photo nu et surtout quelqu’un qui arriverait à sublimer ce corps que je n’aime pas. Pour essayer d’en faire quelque chose !!! Soit du nu artistique, soit des gros plans de mon corps, mais toujours avec cette idée que : OUI, même moi, j’ai un corps qui peut faire rêver ou fantasmer.

Un jour, en traînant sur facebook, je suis tombé sur la publication d’Idan au sujet de son projet « Un Anonyme Nu Dans le Salon ». 

Ça a été une vraie révélation pour moi.  Le projet d’Idan est vraiment ce que je cherchais. Mettre en avant des inconnus, des gens « normaux », avec des tronches, des physiques de monsieur et madame tout le monde. J’ai trouvé le projet « purity », très joli et certaines photos m’ont vraiment touché. La surexposition des corps fait que les contours sont doux et la vision du corps nu est totalement différente de ce que je pouvais imaginer d’une photo de nu. Il y avait des hommes comme moi, et ils étaient beaux. C’était magique pour moi, et je n’avais jamais vu un tel projet. 

Plus je regardais les photos, et plus je me disais que j’allais pouvoir réaliser mon rêve. Mais du coup, la réalité m’est revenue en pleine tronche. Il allait falloir que, moi Fabien, je me mette nu devant un inconnu  pour autre chose que du sexe. C’était un vrai problème pour moi. Comment j’allais réagir ? Au final, pourquoi le faire ? Je suis laid, donc aucun intérêt pour Idan. Je ne m’aime pas, donc, le rendu sera à mon image : moche.

Et pourtant, je me suis fait violence. Je me suis inscrit en me disant que c’était maintenant. J’ai hésité, mais pas longtemps : 1 heure maxi. C’était pour moi. J’ai pris un rendez-vous assez loin dans le temps (quand même, on se refait pas non plus). Un jour où je savais que je serai seul, sans aucune excuse pour annuler ou reporter. C’était un samedi après-midi d’août 2019. Je me souviens très bien du temps qu’il faisait dehors (il faisait très chaud) et de l’état d’esprit dans lequel j’étais : un mélange de fébrilité et d’anxiété, mais avec une pointe d’envie. Je ne savais absolument pas comment la séance allait se dérouler, je m’imaginai un studio immense tout blanc de partout. Je ne le savais pas encore, mais cette séance allait être pour moi une vraie thérapie.

 J’arrive devant ce grand bâtiment blanc, avec plein de logement. Je me dis, comme ça rapidement, c’est louche ce truc. Comment peut-il y avoir dans ce bâtiment, LE studio que j’avais imaginé ? Je sonne, les portes s’ouvrent et Idan vient m’accueillir dans son studio qui ressemble étrangement à un appartement en fait. Je patiente quelque minute en attendant qu’Idan vienne me chercher. Des photos de la collection « Purity » sont accrochées au mur. Curieusement, je n’ai plus d’appréhension sur le lieu, alors qu’il ne ressemble pas du tout à mon imaginaire. Idan vient me chercher et m’invite dans SON studio. Et là c’est un petit choc : une pièce sombre, intime, avec un canapé, un bureau, un paravent, 2 énormes spot de photographe devant un mur blanc. Mur qui est fait un grand rouleau de papier déroulé du plafond au sol. Je trouve l’espace entre le mur et les spots assez réduit. Voilà pour  lieu.

Idan m’invite à m’asseoir devant son bureau, et me propose à boire. J’accepte, car j’ai la gorge très sèche.  Et comme indiqué dans son site internet, Idan débute l’explication de la séance, me pose des questions sur mes motivations, ce que je suis, qui je suis. Je réponds à toutes ses questions, sans dérobade. Pas de questions intimes, c’est plutôt moi qui aborde ces questions : ma vie privée, ma relation à mon corps. Puis vient le moment fatidique où Idan m’invite à passer derrière le paravent où je dois me déshabiller.  En fait, en retirant mes vêtements un à un, je ne me pose pas trop de questions, sauf des questions techniques : comment je dépose mes affaires : par terre, sur le crochet au mur ??? Des questions futiles, mais des questions quand même. Par contre, une fois nu, la question de la mort : c’est je fais quoi maintenant. Donc je sors du paravent, j’ai peur, je m’avance et je tente de cacher mon intimité avec ma main.

Idan m’invite à me positionner sur le mur blanc, il débute ses instructions sur les poses, et à compter de ce moment précis, mon corps n’a plus d’importance pour moi. Je suis focalisé sur ses instructions et rien d’autres. Je ne me pose aucune question sur, comment je suis, mon sexe est-il visible ou pas, à quoi je ressemble là, nu devant un inconnu dans des positions parfois improbables. NON plus rien, plus aucune gêne. C’est comme si j’étais habillé, comme si je n’étais pas nu. Après réflexion, je suis assez surpris de moi par cette légèreté et cette façon que j’ai eu de prendre les poses. 

Je n’ai aucune idée du temps passé à me faire photographier. A aucun moment je n’ai réfléchi sur les poses prises. A aucun moment, je n’ai dit à Idan : Non vraiment pas comme ça, c’est trop. Il est pro et savait parfaitement ce que physiquement j’étais capable de faire, sans que j’ai à me préoccuper de l’apparence que j’avais.

Séance finie : Déjà !!!! 

 

Le choix de la photo

Passage derrière le paravent, je m’assois devant le bureau et la séquence du choix de la photo débute. Idan m’explique la façon de faire et nous débutons le choix. Les photos défilent, et je me vois pour la première fois nu sur un écran d’ordinateur. Il y a avait pas moins de 200 photos je crois. Je me trouve bien. 

Est-ce que je me trouve beau ? Oui sur certaines oui. Parce que l’angle est mieux, parce que la surexposition est meilleure. J’arrive à porter un jugement positif sur des photos montrant ce corps, mon corps, que je n’aime pas. J’arrive, même à faire un choix en disant : celle là est mieux que celle là. Exit la phrase : « celle là est moins pire que l’autre ». J’arrive à trouver du positif  dans les travaux d’Idan. Je ne me pose aucune autre question à cet instant. Je suis porté par la folie du choix de la photo. 

Nous tombons OK sur la photo qui sera mis en ligne. C’est seulement à cet instant que j’ai pris conscience que n’importe qui allait pouvoir me voir à nu physiquement. Bien sûr je le savais en venant, et Idan m’avait bien expliqué. Mais jusqu’à présent, je pensais à moi, mon corps, ma nudité. Au moment du choix final, j’ai pris conscience que mon corps nu allait être exposé. Des amis, ma famille, mes collègues de travail, avaient la possibilité de me voir nu. Mais c’était un nu que j’avais choisi. Un nu artistique. Pas un nude de Twitter…. Non un truc beau, un mec pas mal en fait. MOI.

J’étais sur un petit nuage, j’étais bien et rassuré. J’étais surtout fière de moi et aussi du travail d’Idan !!! 

 

Le retour à la maison

J’ai longtemps gardé cette expérience pour moi. Personne dans mon entourage ne le sait. Sauf une : ma nouvelle compagne. Je lui ai montré les photos que j’avais acquises. Nous en avons discuté ensemble et elle trouvé le projet très intéressant. Parce que oui, ce projet a contribué largement au fait que j’assume ce que je suis. J’ai changé mon regard sur moi, et donc j’ai modifié ce que moi je pouvais imaginer dans l’esprit des autres. C’est compliqué comme phrase… !!!! Je n’ai plus peur de mon corps. Je ne l’aime pas forcément plus, mais je l’accepte tel qu’il est. La prochaine étape sera pour moi d’en parler librement à mes amis, mes collègues. C’est possible dans un avenir très proche…

Je suis régulièrement les travaux et projet d’Idan, et j’ai très envie de reprogrammer une séance sur un projet « gratuit » ou « payant ». J’ai envie de profiter et de me voir encore différemment, et je suis prêt à en montrer plus. Je suis ravi de cette expérience. 

 

Cette séance photo a rempli sa mission première : me faire accepter mon corps.